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Entretien avec Matthieu Sanders – Peut-on croire à la résurrection de Jésus ?

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Entretien avec Matthieu Sanders – Peut-on croire à la résurrection de Jésus ?

Publié le 21 mai 2024 à 14:43:16

1. Pouvez-vous vous présenter ?

Je suis pasteur à Paris depuis un peu plus de quinze ans, toujours dans la même Église depuis le début de mon ministère (il s’agit de l’Église baptiste de Paris-Centre, rue de Sèvres, dans le 7e arrondissement de Paris). Je suis également, depuis quelques années, professeur associé à l’Institut biblique de Nogent, et chargé de cours à la Faculté libre de théologie évangélique à Vaux-sur-Seine.

Je suis marié à Talia, et nous sommes parents de trois enfants âgés de 11, 8 et 5 ans.

2. Pouvez-vous nous présenter Jésus ?

Jésus est, d’une part, l’homme en qui et par qui Dieu a posé le fondement d’une nouvelle humanité, réconciliée avec Dieu. Il est, d’autre part et sans contradiction, lui-même Fils de Dieu, Dieu fait homme, Dieu venu dans la condition humaine pour nous ramener à Lui. Nous devons tenir ensemble ces affirmations qui dépassent notre entendement, précisément parce qu’elles relèvent de l’Être de Dieu et transcendent toute réalité humaine. Jésus est Sauveur (parce que c’est en Lui que nous trouvons la réconciliation avec Dieu qui nous sauve de la perdition) et Seigneur (parce qu’il est le Souverain légitime sur toute l’humanité). Il est le Messie promis à Israël et le Sauveur du monde entier.

3. Pourquoi sa résurrection est importante pour les chrétiens ?

L’apôtre Paul affirme que si Jésus n’était pas ressuscité, c’est toute notre foi qui serait vaine, et nous serions même « les plus à plaindre » de tous, parce que nous aurions bâti notre foi et notre vie sur un mensonge (1 Corinthiens 15.14-19).En écrivant ces lignes, Paul souligne combien la résurrection de Jésus est essentielle, constitutive de la foi chrétienne. Pourquoi ? D’une part parce que si Jésus était resté au tombeau, cela aurait signifié que Dieu était incapable de vaincre la mort, laquelle s’imposerait comme une réalité absolument intangible et irrévocable… même pour Dieu. Quelle assurance pourrions-nous avoir de notre propre résurrection à venir, proclamée à plusieurs reprises dans l’Écriture ? Si le tombeau a eu le dernier mot après la crucifixion de Jésus, il n’y a aucune raison d’espérer qu’il soit vaincu dans la vie de qui que ce soit d’autre.

En outre, Jésus est mort pour subir la sentence que méritaient les hommes pécheurs, pour que la justice de Dieu contre le mal soit accomplie. Mais il n’y a pas là une réalité que Dieu a « subie », mais plutôt une œuvre qu’Il a choisid’accomplir, sans jamais en perdre le contrôle. Ainsi, le Fils de Dieu a librement consenti à mourir sur la croix pour accomplir cette œuvre d’annulation de notre faute. Mais c’est tout aussi librement et souverainement que, cette œuvre accomplie, il est ressuscité, parce que « la mort ne pouvait pas le retenir » (Actes 2.24). Il en va de la puissance et de la souveraineté de Dieu comme de la divinité de Jésus. D’ailleurs, une compréhension juste de la doctrine de la Trinité rend inconcevable l’idée même que Dieu le Fils puisse demeurer dans la mort.

Enfin, si Jésus était resté mort, il ne pourrait plus « intercéder pour nous » auprès de Dieu le Père, c’est-à-dire témoigner perpétuellement du pardon qu’Il nous a offert. Cela laisserait entendre que la condamnation méritée par les pécheurs demeurerait éternellement, quand bien même elle aurait été déplacée sur quelqu’un d’autre que ceux qui la méritaient. Or la résurrection de Jésus nous dit que non seulement Jésus a pris la condamnation à notre place, mais que cette dette a été payée et n’existe plus.

4. Pouvez-vous nous résumer les cinq textes bibliques qui mentionnent la résurrection ?

Il y a, en fait, bien plus que cinq textes qui évoquent la résurrection de Jésus, mais nous avons cinq textes qui relatent cet événement.

Le plus ancien de ces textes (datant des années 50 du premier siècle) est le résumé très concis que l’apôtre Paul nous en donne au début du chapitre 15 de sa première lettre aux Corinthiens. Il décrit une liste de témoins oculaires du Christ ressuscité, sans toutefois donner en détail le déroulement des événements.

Un peu plus tard (probablement au cours des années 60) ont été rédigés les trois évangiles dits « synoptiques » dont le récit et la forme sont relativement proches, ceux de Matthieu, Marc et Luc. Un élément frappant est de constater que si ces évangiles sont globalement très proches, en revanche, leurs récits de la résurrection sont tous trois fort différents, sans (à mon sens) se contredire pour autant. Ce constat semble indiquer que les récits de la résurrection ont été rédigés, pour une large part, indépendamment les uns des autres.

Une curiosité est que le récit de Marc s’interrompt brutalement après l’annonce de la résurrection, sans que les apparitions du Ressuscité ne soient décrites (la section souvent ajoutée entre crochets ou en italique dans la plupart des Bibles, à partir de Marc 16.9, n’est pas présente dans les manuscrits les plus anciens et les plus fiables du Nouveau Testament). Devant cette fin étonnante du récit, les avis sont partagés : Marc a-t-il fait exprès de s’arrêter là, pour laisser le lecteur tirer ses propres conclusions ? Ou la fin de son évangile a-t-elle été perdue dès le début du processus de transmission du texte ? Je penche pour ma part pour cette seconde hypothèse.

Une ou deux décennies plus tard, probablement, l’évangile de Jean a été rédigé à son tour. C’est dans cet évangile que nous trouvons le récit le plus long et le plus détaillé de l’événement de la résurrection. Là encore, le récit est fort distinct des autres, malgré des convergences essentielles.

5. Quels sont les arguments en faveur de la résurrection ?

Les cinq arguments que je développe dans le livre (ce ne sont pas les seuls !) sont les suivants :

6. Pourquoi croire à la résurrection de Jésus ?

Je suggère dans ce petit livre que les hypothèses courantes d’un mythe sciemment construit par des manipulateurs, d’une part, ou d’une légende naïve qui se serait construite au fil du temps, d’autre part, ne résistent pas à un examen historique. Lorsqu’on creuse la question, on doit d’abord conclure, en voyant des sources diverses, parfois en tension, mais convergentes sur l’essentiel, qu’elles remontent à un même événement qu’elles cherchent à décrire. On doit ensuite constater que ceux qui relatent l’événement sont sincères, ils croient ce qu’ils affirment. Enfin, si l’hypothèse d’une légende paraît superficiellement « tentante », un grand nombre d’éléments montrent que les récits se prêtent mal à cette catégorie et se présentent plutôt comme des témoignages.

En bref, il n’est pas possible, face à ces récits, de garder une bienveillance neutre ou de camper sur un scepticisme de principe qui refuse d’entrer en matière. Si on veut rejeter l’affirmation que Jésus est ressuscité, il faut avancer d’autres explications de ces témoignages. Or, c’est extrêmement difficile d’en trouver des explications satisfaisantes. Il existe une autre possibilité : estimer que les récits sont des témoignages authentiques d’un événement véridique. Pour certains, il est incontestable que cela impliquera de changer de vision du monde, car une cosmologie strictement matérialiste ne permet pas de rendre compte de l’événement de la résurrection.

7. Avez-vous deux ou trois ouvrages à conseiller à nos lecteurs ?

Sur le thème de l’historicité de la résurrection de Jésus, l’ouvrage qui fait référence, en anglais, est The Resurrection of the Son of God de N.T. Wright. Ce dernier a également écrit un livre plus « grand public » mais qui se penche aussi sur la résurrection de Jésus, et celui-là existe en français : Surpris par l’espérance (paru chez Excelsis en 2019). Je recommande vivement ces deux ouvrages.

Sur d’autres sujets, j’ai récemment beaucoup apprécié un petit livre très accessible sur la doctrine de la Trinité, The Biblical Trinity, de Brandon Smith, qui mériterait à mon sens une traduction en français. Il y a actuellement dans une partie du monde évangélique américain une belle réappropriation de la doctrine de la Trinité, qui pourrait nous inspirer en francophonie.

Enfin, pour redécouvrir sous la plume d’un auteur francophone « le monde de Jésus », les judaïsmes du premier siècle et le contexte historique du Nouveau Testament, je recommande Au temps de Jésus de Michaël Girardin.